TOURNESOLS

Par Zone Occupée

Tournesol III ©Susie Lévesque

Susie Lévesque

Après des études en arts, Susie Lévesque s’est rapidement intéressée aux livres ainsi qu’aux différentes manifestations culturelles. Libraire depuis 2014, elle a pris une pause et s’est exilée pendant un certain temps dans les terres nordiques et montagneuses du Yukon. De retour au Saguenay, elle est maintenant libraire à Point de Suspension, organisation affiliée au centre d’art actuel Bang. Cette présence constante d’œuvres visuelles dans son milieu de travail lui aura certainement donné le goût de produire des images, car en plus de sa passion pour la poésie et la bande dessinée, elle se livre assidûment à la photographie argentique.

La « Ferme des Perron »

Tous les jours, pour me rendre au travail, je fais le trajet La Baie-Chicoutimi en passant par le boulevard Saint-Jean-Baptiste. Je passe devant ce que j’appelle communément la « Ferme des Perron » depuis des années.

D’aussi loin que je me souvienne, l’été passé, c’était la première fois que je voyais des tournesols pousser dans leur champ. Je ne pouvais m’empêcher de détourner le regard de la route parce que je trouvais le décor bucolique de la vieille grange au toit rouillé et des fleurs étonnamment beau. J’ai finalement décidé d’écrire aux propriétaires des « Jardins Perron » afin de savoir si je pouvais avoir accès à leur terre. Ils ont gentiment accédé à ma requête.

Les fleurs n’étaient pas là simplement par pur esthétisme. Elles avaient été plantées-là dans le but de recueillir leurs graines. La personne avec qui je me suis entretenue m’a appris qu’ils avaient l’intention de produire de la nourriture pour les oiseaux avec les tournesols qu’ils avaient cultivés. Je suis donc allée plusieurs fois sur le site entre juillet et septembre. Si au départ j’avais été séduite par les glorieuses fleurs jaunes, ce sont les tournesols flétris qui sont devenus les plus intéressants pour moi. L’éclat des fleurs avait disparu, elles étaient maintenant fanées et séchés mais cela leur donnait une allure encore plus saisissante avec leurs textures diverses.

 

Leur beauté initiale est en quelque sorte devenue superflue. Je préférais la subtilité de leur déclin.

 

Le potentiel des choses mortes

Il s’est écoulé un certain temps entre la prise des photos et le développement des pellicules; j’avais oublié ce que j’avais photographié. C’est en faisant développer mes négatifs et en les numérisant que j’ai immédiatement fait le lien avec le thème de ce numéro de Zone Occupée et ce que les gens des « Jardins Perron » m’avaient présenté de leur projet. Les fleurs qui étaient en train de pourrir allaient se transformer en nourriture, pas pour les êtres humains mais en nourriture tout de même.

J’ai donc recontacté les propriétaires de l’endroit afin qu’ils m’en disent plus sur le sujet. Nous étions en novembre. Gaétan, la personne avec qui j’avais déjà communiqué, m’a appris qu’ils avaient récolté les tournesols à la moissonneuse-batteuse au mois d’octobre et que les graines étaient en train de sécher dans les silos. Il ne leur restait qu’à cribler les graines afin de les nettoyer des impuretés. La suite étant d’ensacher le tout.

 

Comme quoi le potentiel des choses mortes peut être louable.

 

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